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Le blog de didier falleur pensées nomades

Mon petit frère est mort

didier falleur

Nous étions une fratrie, une fratrie de trois, une trifratrie donc.

Il avait 66 ans, ce n’est pas vieux mais en même temps c’est quelque chose que l’on savait probable depuis longtemps mais c’est quand même un choc de perdre son frère si tôt.

Nous avons eu une enfance heureuse d’après nos maigres souvenirs et les photos qui restent dans les albums. Un père absent, ma maman m’a dit qu’il s’est aperçu de sa paternité au troisième enfant c’est à dire avec Lionel donc et qu’il ne fallait pas lui demander de changer des couches ou de donner à manger. Faut pas déconner !!! mais une mère très aimante aidée de filles au pair au début de nos vies.

Mon petit frère est mort
Mon petit frère est mort
Mon petit frère est mort
Mon petit frère est mort
Mon petit frère est mort
Mon petit frère est mort
Mon petit frère est mort

Ça a commencé à merder quand ils ont divorcé (j’avais dix ans, ma sœur 8 et Lionel 6) mais on s’en est sorti chacun de notre coté sauf un peu Lionel qui a subi un choc émotionnel important avec la mort d’un ami d’enfance très proche. Alors il s’est mis dans la musique, la batterie à fond et ses voisins s’en souviennent encore et c’est un binôme qui a très bien fonctionné : un groupe : ICTUS et des rencontres sensationnelles pour comme une collaboration avec Albert Marcoeur lui puis une passion pour la musique arabe qui l'a amené vers d'autres univers.

Mon petit frère est mort
Mon petit frère est mort
Mon petit frère est mort

Nous avons fait des choses extras ensemble : de la varappe à Fontainebleau, des courses de motos à Monthléry, au Mans et jusqu’en Hollande pour un Grand Prix où Agostini a remporté toutes ses courses. Génial ! et bien sur des concerts en pagaille : Gong, Magma, Albert Marcoeur bien sur, Gentle Giant, National Health, UK et j'en oublie forcément....

LIONEL A LARCHANT - LE BAR DE LA DAME JEANNE

LIONEL A LARCHANT - LE BAR DE LA DAME JEANNE

Il m’a rejoint au Brésil à Recife où j'habitais après un vol low-cost de l’époque c’est à dire dans un vieux Boeing 707 pourri et une descente qui lui a fait mal aux oreilles. Mais déjà un mal le rongeait et l’alcool a fait son apparition dans sa vie et cela a été compliqué de le gérer dans ces moments d’abandon mais ce voyage a tout de même permis de vivre des moments uniques : Salvador de Bahia, Rio, Corumba et ce fameux train de la muerte vers Santa Cruz en Bolivie, La Paz, Salar de Uyuni, lac Titicaca puis le Pérou, Cuzco et le Machu Picchu pour une première rencontre avec un groupe de routards venus du monde entier. Quel voyage, quelle ambiance !!!!

Il est rentré en France et a suivi une formation de paysagiste (major de sa promotion, bravo) mais lassé de creuser des tranchées pour y mettre des tuyaux d’arrosage, je lui ai suggéré d’aller frapper à la porte de la Fnac et le succès a été au rendez vous et vous connaissez la suite, brillante !!! Mais la musique a fait faillite et la suite de sa vie n’a plus été un long fleuve tranquille mais une descente progressive dans le désarroi malgré l’aide permanente de femmes attentionnées et d’une sœur totalement dévouée.

 

LIONEL ET PASCALE
LIONEL ET PASCALE
LIONEL ET PASCALE

LIONEL ET PASCALE

rien n’a été possible pour le sortir de ce spleen destructif et quand Philippe nous a appelé pour nous dire qu’il était à l’hôpital dans le coma j’ai eu envie de crier :

« Putaing, Lionel, y’a Lionel qui ne va pas bien du tout, faut faire quelque chose !!! »

Mais je n’ai pas eu de réponse et les deux Lionel se sont retrouvés et ce n’est pas celui qu’on voulait qui a gagné.

Alors on y va avec Marie par le premier train disponible. Arrivés un peu tard chez Philippe, nous attendons le lendemain pour aller à l’hôpital et le vendredi nous avons un échange avec le responsable de la réanimation et il nous dit assez rapidement qu’il va falloir croire à un miracle mais qu’ils font tout ce qu’il faut pour y arriver. Nous entrons dans la chambre et le tableau est impressionnant, Lionel allongé sur le ventre bardé de tuyaux et des machines tout autour de lui pour l’aide respiratoire et la dialyse. Ils disent le mettre sur le ventre plusieurs fois par jour pour aider à la ventilation plus une trentaine de médicaments injectés par une autre machine. Nous restons un moment mais que faire de plus ?

Nous rentrons chez Philippe et Dominique.

Le lendemain, nous y retournons et Lionel est sur le dos et son visage est méconnaissable. Ce n’est pas vraiment Lionel qui est en face de moi (je dis à Marie de ne pas venir le voir, elle serait trop choquée) mais le visage d’un homme que la maladie est en train d’emporter.

Dimanche, retour à l’hôpital et là les nouvelles ne sont vraiment pas bonnes. Il est toujours sur le dos et son visage a encore changé de couleur. D’ailleurs le personnel de la réanimation (des gens incroyables et totalement dédiés à leur travail) nous disent que c’est une question d’heure car une des courbes de l’écran de contrôle est plate. Seul le cœur émet encore ses pulsations. Nous rentrons et nous leur disons que ce n’est pas la peine de nous appeler dans la nuit car nous sommes hébergés trop loin pour venir en catastrophe.

Le lundi matin j’appelle l’hôpital et on nous annonce qu’il est mort à 2h00 du matin. Cette fois ci je le vois seul dans la chambre mortuaire de l’hôpital. Il est tout froid. Je ne sais pas quoi lui dire à part un : « Salut frérot, maintenant tu vas être tranquille et fini les emmerdes ». On nous donne un sac contenant ses vêtements et nous partons.
Marie est dévastée.

Nous devons passer dans un organisme de pompes très funèbres. On choisit un indépendant, pas une de ces entreprises de la mort et nous passons chez Lionel pour commencer à faire le tri dans sa « maison ». Je ne sais pas si on peut appeler cet endroit une « maison » mais c’était chez lui alors je la respecte. On dit à Philippe qu’il peut prendre ce qu’il veut. Il se contente d’un plat de céramique et de quelques babioles.

Marie prend son beau Laguiole. Le reste, on verra plus tard lors du déménagement et nous rentrons chez Philippe et Dominique.

Mardi, je dis à Marie que ce n’est pas la peine de rester, que je vais m’occuper des paperasses et que le rendez vous au funérarium n’aura lieu que la semaine prochaine. Je l’accompagne à la gare de Lyon. Elle rentre dans sa maison.

Voilà, un pan de notre histoire se termine, le petit frère est parti et nous laisse avec un grand vide même si nos relations n’étaient pas au beau fixe et nous ne pourrons jamais plus nous réconcilier alors qu’avec le temps et la sagesse de l’âge nous aurions pu doucement nous rapprocher. Le temps s’est figé ce lundi 2 septembre.

Philippe, qu’il connaissait depuis son passage à la Fnac, n’est pas là aujourd’hui mais je tiens à lui rendre un hommage solennel. Oui, sans Philippe, je pense vraiment que Lionel nous aurait quitté il y a très longtemps car il a été présent à ses cotés tout le temps et surtout dans ses moments les plus difficiles. Frédérique a aussi accompagné Lionel durant son séjour à Paris et l’a emmené au Pérou lors d’un voyage organise par la Fnac. Nous ne le savions pas.

Mon petit frère est mort
Mon petit frère est mort
Mon petit frère est mort
Mon petit frère est mort
Mon petit frère est mort

Voilà, un pan de notre histoire se termine, le petit frère est parti et nous laisse avec un grand vide même si nos relations n’étaient pas au beau fixe et nous ne pourrons jamais plus nous réconcilier alors qu’avec le temps et la sagesse de l’âge nous aurions pu doucement nous rapprocher. Le temps s’est figé ce lundi 2 septembre.

Mon petit frère est mort
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Commentaires
S
Triste récit qui me ramène à mes propres souvenirs et cet article est un bel hommage à ton frère
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