Voyage en Roumanie
Lundi
Bucarest est en vacances, la ville est tranquille et l'appréhension que nous avions pu avoir s'efface bien vite. Point de poussière, de circulation frénétique et même les chiens errants mentionnés dans tous les guides plus ou moins alarmistes se font eux aussi rares, aussi rares que les touristes qui semblent ignorer cette partie de l'europe.
Le centre ancien est en pleine rénovation et les panneaux décorés du drapeau européen vont fleurir près des sites touristiques les plus remarquables, comme si l'europe ne se préoccupait que de la façade d'un pays. On aurait tendance à le croire.....Mais bon.....
Le boulevardbidul qui mène au plus que pompeux palais du Gouvernement voulu par Ceausescu durant plus de 20 ans et qui a totalement ruiné le pays fait 60cm de plus que les Champs-Elysées. La mégalomanie de ce fou n'avait pas de limite. Les immeubles cossus aux paraboles dignes de poursuites spaciales sont assis sur des boutiques à moitié abandonnées et des pans de faux marbre ou de parements se détachent immanquablement. Qui va entretenir cette ville d'apparat ????
A la vue de cette masse de béton posée sur ce petit tertre on pourrait aussi penser que Boffil s'en est inspiré pour chier ses immeubles aussi laids que prétentieux. Mais certains dirigeants de l'époque devaient trouver cela "moderne".
Dans la ville, tous les styles se mélangent et l'architecture n'a pas plus de deux siècles à part quelques églises rescapées du massacre quand elle n'ont pas été tout simplement déplacées.
Il faut, comme d'habitude, se laisser perdre dans la ville, rencontrer un petit quartier "Art déco" bien mal en point puis, pour finir la journée, s'asseoir sur un banc du parc et regarder les gens flâner tranquillement.
Mardi
Gara du nord. Train pour Suceava. Sept heures pour 450km. Le wagon neuf se rempli peu à peu. Bucarest s'efface pour laisser place rapidement à une campagne en plaine immense et cultivée où les machines agricoles modernes laissent parfois place à la faux et les charrettes tirées par des chevaux.
Suceava; la ville ressemble à une station de ski ratée des années 70 : blocs et trottoirs en béton et toits en pente. Encore des travaux partout.
La petite pension mentionnée dans le guide s'avère parfaite et Adina parle assez bien l'espagnol pour avoir une bonne conversation.
Mercredi
Les nuits ne sont pas encore des plus reposantes mais la marché animé de ce mercredi matin comme de tous les jours offre le spectacle toujours vivant de la vie rurale : étals de fruits et légumes sous les halles, produits laitiers enfermés dans une petite pièce à part où femmes et hommes proposent fièrement tous le même fromage. C'est dur de choisir alors nous allons vers le plus beau sourire. Dehors, objets divers, pastèques, miels, eau de vie et lait que l'on goûte directement dans le bouchon de la bouteille pour choisir. Assis à la terrasse d'un café où l'on nous sert une délicieuse limonade fraîche et du thé à l'infusion, nous observons ce tranquille va et vient.
La matinée passe vite à ce rythme paresseux et nous nous mettons à la recherche d'une voiture de location nous étant rendus à l'évidence que les transports locaux et l'éparpillement des sites à visiter nécessiteraient ce moyen de transport. Kataline nous loue une Clio "turque" pour 37 euros par jour et nous fait bien remarquer qu'elle est très belle. Il tient à son parc comme à de précieux bijoux. Les premiers kilomètres passés et la conduite bien adaptée au trafic roumain, la petite auto va nous emmener jusqu'aux confins de la Bucovine chère à Gregor Von Rezzori.
L'après midi, nous faisons connaissance avec notre premier monastère : Dragomirna à quelques km de Suceava mais il est en restauration et le clocher comme l'intérieur de l'église sont occultés par des bâches et des échafaudages. Dommage ! Nous apprécions quand même l'élégance de la construction en pierres. Visite ensuite à la petite l'église de Parnauti où un curé hautain nous adresse tout juste la parole. Déjà quelques fresques murales pour la mise en bouche.
Sur le chemin du retour, nous prenons deux jeunes stoppeurs qui veulent nous payer deux lei pour le trajet. Nous refusons mais nous voila bien dans les coutumes locales.
Jeudi
L'orage a grondé fortement cette nuit, rafraîchissant l'atmosphère. La route nous conduit à Radauti, grosse bourgade. Visite à l'artiste potier qui ne met pas de prix sur ses pièces et déambulation dans la ville à l'architecture hétéroclite : Sculpture soviétique et vieux immeubles aux formes arrondies.
Avant de se rendre à Putna, comme la route passe près de la frontière Ukrainienne, nous ne résistons pas à "aller voir" à quoi cela ressemble. Brrrr! Un no-man's land sans possibilité de retour ???? Nous la croyons fermée mais plus tard, dans le rétroviseur, je verrai un 4x4 Ukrainien occupé par quelques barbouzes en maraude. Cela passait donc mais l'expérience ne nous a pas tentés cette fois .......
Putna; le monastère se déniche au bout d'une belle allée de cyprès. Mais nous sommes déçus par les peintures neuves. Une petite église en bois dans le cimetière adjacent est plus jolie mais hélas fermée. Nous nous rattraperons plus tard...
Encore un orage violent sur la route pour rejoindre Sucevita, deuxième monastère du jour.
Tenu pas des nonnes; il est enchâssé dans un écrin de verdure et entouré par de massifs murs telle une forteresse. L'une d'entre elles annonce l'office en frappant une planche de bois à l'aide de deux maillets. Cela donne un bruit de percussion assez surprenant dans ce lieu. Sucevita est renommé pour ses peintures et nous ne serons pas déçus. La splendide représentation de "l'échelle des vertus" vaut a elle seule le déplacement.
En fin d'après midi, nous nous offrons une première balade en forêt après avoir laissé nos affaires dans notre pensiune du soir chez l'habitant. Une ferme et une chambre mansardée où le bois règne en maître. Nous empruntons une route forestière qui semble indiquer la présence d'un lac à 3km. Trois km normalement, cela se fait en 3/4 d'heure mais au bout d'une heure et quart, toujours pas de lac et la piste se transforme vite en sentier qui grimpe mais l'heure tardive nous fait rebrousser chemin. Dommage ça sentait bon la forêt. Nous comprendrons plus tard que le panneau du lac semble proliférer un peu partout même s'il n'y a pas de lac aux alentours... Quels blagueurs ces roumaings !!!!!
Et c'est là que je peux affirmer que la forêt ressemble toujours à la forêt. Son universalité est évidente que l'on se trouve ici, en Roumanie ou là-bas en Chartreuse ou dans le Vercors. Les forestiers font aussi bien pour la laisser dans un chantier épouvantable, puis la piste se rétrécit et serpente parmi les arbres. Les odeurs de feuilles en décomposition se mêlent à celles plus fortes de l'humus et des champignons invisibles.
Seuls les balisages diffèrent et vous rappellent que vous êtes plus loin que prévu.
Vendredi :
Col de Gurmarna (1095m) temps froid et gris mais très belle vue sur les massifs environnants. Un monument symbolise la construction de cette route dans les années 60.
Le monastère de Moldovita (1537) vaut pour sa spectaculaire représentation du siège de Constantinople par les mers et par la terre. Les Turcs, ennemis du jour, ont remplacé les Perses. On arrange l'histoire.
Passage rapide par Vatra Dornei (capitale de l'eau minérale et lieu de villégiature privilégié du Capitaine Haddock). Nous y reviendrons.
L'étape du soir se fait dans une petite pension familiale à Cozanesti. Nous y rencontrons Raoul, un roumain marcheur qui nous donne de précieuses indications pour randonner dans les monte Rarau.
Samedi :
Ce que nous faisons au départ de Rusca. Le temps est splendide ce matin. Nous laissons la voiture sur la piste (que nous retrouverons avec des marques de tentatives de "fouille"). Cinq heures A/R. Passage par le refuge de Guimalau à 1650m où nous causons avec des randonneurs venus pour y passer la nuit et faire la fête puis ascension du sommet du même nom à 1857m. Il fait un froid de gueux là-haut et nous ne restons que le temps de nous restaurer.
Nous reprenons la route pour passer par le col de Rarau. La route est en fait une piste difficile et dangereuse, juste assez large pour notre petite voiture.
Nous rejoignons Voronet dans la soirée.
Dimanche :
Monastère de Voronet (1488). Dans ces tons bleus si particuliers à l'endroit, la plus ample composition est le "Jugement dernier". Cette fresque occupe tout le mur Ouest et comprend des scènes célèbres comme :"Les anges aux prises avec les diables", "La résurrection des morts" et "Les Archanges".
Monastère d'Humor. Il se trouve en face de celui de Voronet. Tout est malheureusement fermé à cause de l'office. Nous ne pouvons même pas accéder à la tour qui permet d'avoir une belle vue sur l'ensemble. Ce n'est pas trop grave; nous avons vu assez de belles choses et elles ont tendance à se répéter.
Retour à Suceava pour rendre la voiture à Kataline puis bus illico pour Borsa et re-bus illico pour Vatra Dorneï. Tout s'enchaîne par magie et nous ne perdons pas de temps en attente fastidieuse.
Vatra Dorneï pour la nuit à l'hôtel Bucovina qui nous projette immédiatement dans une ambiance post -soviétique des plus étrange mais le personnel féminin est charmant et nous aide à perfectionner notre vocabulaire roumain. C'est dimanche et la ville se promène dans le parc aux allées bien dessinées.
La gare est adorable et donne envie de prendre le premier train qui part.
Suite dans le prochain chapitre : Flo et Did en Maramures